>  Wery Immo   >  Permis d’urbanisme et environnement   >  Région wallonne : quelques développements récents en matière d’infraction urbanistique, de transaction et de permis de régularisation

Région wallonne : quelques développements récents en matière d’infraction urbanistique, de transaction et de permis de régularisation

Le décret du 24 mai 2007 relatif aux infractions et sanctions en matière d’urbanisme a pour objectif d’instaurer un système qui garantit l’intervention des autorités judiciaires ou administratives dès qu’une infraction urbanistique est constatée dans un procès-verbal d’infraction, afin que les actes et travaux exécutés ou maintenus en infraction fassent l’objet soit d’une sanction, soit d’une réparation, soit encore d’une régularisation combinée avec une transaction. Plusieurs mesures sont ainsi prévues.

 

Encadré :

Le décret du 24 mai 2007 n’est pas applicable aux actes et travaux exécutés ou maintenus sans permis d’urbanisme ou sans déclaration urbanistique préalable et qui ont fait l’objet d’un procès-verbal de constat d’infraction notifié avant l’entrée en vigueur du décret le 28 juin 2007.

 

Il s’en déduit que les infractions antérieures au 28 juin 2007 ayant fait l’objet d’un procès-verbal d’infraction notifié après le 28 juin 2007 sont soumises aux nouvelles règles applicables.

 

Sur ce point, le décret instaure une certaine forme de rétroactivité à l’égard des infractions commises avant son entrée en vigueur, ce qui n’est pas sans poser question compte tenu des effets désormais reconnus par le législateur à la notification d’un procès-verbal d’infraction.

 

 

  1. La notification du procès-verbal d’infraction interdit la délivrance d’un permis de régularisation.

 

Dès que le contrevenant s’est vu notifier un procès-verbal d’infraction, toute demande de permis d’urbanisme de régularisation (ou de déclaration urbanistique de régularisation) doit être déclarée irrecevable aussi longtemps que :

 

1° soit un jugement correctionnel coulé en force de chose jugée n’a pas statué sur la demande de remise en état formulée par le fonctionnaire délégué et le collège échevinal ;

 

2° soit le montant de la transaction proposée au contrevenant n’a pas été versée.

 

Cette règle pourrait avoir des conséquences étendues, si elle devait être interprétée comme imposant de déclarer irrecevable toute demande de permis qui a pour effet de régularisermême indirectement ou partiellement une infraction constatée par procès-verbal.

 

Dans une telle acception, la plupart des procès-verbaux aura pour effet de bloquer durablement les immeubles concernés, alors même qu’aucune juridiction ne s’est encore prononcée sur le bien fondé de l’infraction constatée et sans garantie aucune qu’une action judiciaire sera menée à l’encontre de l’auteur de l’infraction à ce sujet.

 

La compatibilité d’un tel régime avec le droit à un procès équitable pose assurément question, d’autant qu’aucune voie de recours n’est a priori ouverte à l’encontre d’un procès-verbal d’infraction. L’auteur de l’infraction suspectée n’aura alors d’autre salut que de tenter de convaincre l’auteur du procès-verbal d’annuler celui-ci en établissant que l’infraction n’est pas établie ou de payer la transaction.

 

 

  1. Le mécanisme de la transaction est renforcé au détriment de mesures classiques de réparation

 

A l’instar du régime antérieur, le fonctionnaire délégué et le collège échevinal peuvent poursuivre les mesures de réparation (remise dans le pristin état, travaux de transformation ou payement de la plus-value acquise par le bien suite à la commission de l’infraction) devant le tribunal correctionnel ou devant le tribunal civil. Il en sera ainsi notamment lorsque l’infraction est considérée comme insusceptible de régularisation.

 

En revanche, lorsque l’infraction est susceptible de régularisation, une transaction peut intervenir avec le contrevenant. Le nouveau décret prévoit désormais que, dans cette hypothèse, le gouvernement et le fonctionnaire délégué, de commun accord avec le collège échevinal, doivent proposer une transaction.

 

La transaction devient, en quelque sorte, le principe, sous ces deux importantes réserves que l’appréciation du caractère régularisable ou non de l’infraction relève dans une large mesure du pouvoir discrétionnaire des autorités appelées à proposer la transaction et que la transaction ne peut être proposée que lorsque le Procureur du Roi n’a pas marqué son intention de poursuivre l’auteur de l’infraction devant le tribunal correctionnel dans les 90 jours de la demande qui lui est faite.

 

La transaction est proposée par le gouvernement ou le fonctionnaire délégué de commun accord avec le collège échevinal, étant entendu que la décision de la commune est réputée favorable à la transaction en l’absence de réaction dans les 60 jours de la demande du gouvernement ou du fonctionnaire délégué.

 

 

  1. Les conditions dans lesquelles une transaction peut être proposée

 

 

Les conditions dans lesquelles une transaction peut être proposée ont été sensiblement élargies, puisque la transaction peut désormais être proposée aux deux conditions cumulatives suivantes :

 

1° les actes et travaux infractionnels sont susceptibles d’obtenir le permis d’urbanisme requis eu égard à la destination générale de la zone ou de son caractère architectural ;

 

2° les actes et travaux infractionnels :

 

– soit sont conformes à la réglementation en vigueur au moment de leur accomplissement (conformément à une jurisprudence récente du Conseil d’Etat), et, lorsqu’elle est plus favorable à l’auteur de l’infraction, à la réglementation en vigueur au moment du dépôt de la demande (et, curieusement, pas au moment de statuer sur la demande de permis) ;

– soit répondent aux conditions légales dans lesquelles un permis d’urbanisme dérogatoire est susceptible d’être accordé (ce qui n’était pas possible précédemment).

 

 

  1. Les effets de la transaction

 

 

Le versement de la transaction « éteint l’action publique et le droit pour les autorités publiques à demander toute autre réparation », comme le prévoyait déjà le régime antérieur. Il permet également l’introduction d’une demande de permis d’urbanisme de régularisation.

 

Les travaux préparatoires rappellent que le payement de la transaction ne préjuge en rien de l’issue de la demande de permis de régularisation, même si le respect du principe de bonne administration inviterait les autorités administratives à envisager une issue favorable à la demande de régularisation qui serait introduite à la suite du versement du montant de la transaction.

 

Il est regrettable que le législateur ait découplé la délivrance du permis de régularisation du paiement de la transaction, sans simultanément appréhender spécifiquement les effets de la transaction dans l’hypothèse où le permis de régularisation devait néanmoins être refusé pour des motifs d’opportunité urbanistique qui ont échappé au fonctionnaire délégué et au collège échevinal au moment de la proposition de la transaction : d’une part, le droit pour l’autorité publique de demander toute autre forme réparation est éteint, de l’autre, la situation infractionnelle n’est pas couverte par un permis d’urbanisme de régularisation.

 

 

  1. Le refus de la transaction

 

 

L’auteur présumé de l’infraction est en droit de refuser la transaction auquel cas il s’expose au risque de voir le Procureur du Roi entamer des poursuites à son encontre auprès du tribunal correctionnel ou de voir le fonctionnaire délégué ou le collège échevinal solliciter une mesure de réparation auprès du tribunal civil.

 

Si le risque de poursuites d’initiative du parquet demeure relativement marginal, l’auteur s’expose néanmoins au risque de se voir condamné non seulement à une éventuelle peine correctionnelle mais également au payement de la plus-value acquise par le bien suite à la commission de l’infraction qui semble la seule mesure envisageable à l’égard de travaux susceptible de régularisation et ayant fait l’objet d’une proposition de transaction.

 

 

 

*

 

La notification du procès-verbal d’infraction urbanistique interdit désormais la délivrance d’un permis de régularisation. La légalité du procédé pose question au regard du droit à un procès équitable, à tous le moins s’il doit être interprété comme rendant irrecevable toute demande de permis qui a pour effet de régularisermême indirectement une infraction constatée par procès-verbal, car aucune voie de recours n’est ouverte pour contester le procès-verbal d’infraction, tandis que le prévenu n’a aucune assurance d’être poursuivi et donc de pouvoir se défendre des faits qui lui sont reprochés dans ledit procès-verbal.

 

Par ailleurs, le mécanisme de la transaction est encouragé et renforcé, puisque le nombre d’hypothèses dans lesquelles elle peut intervenir a été élargi.

 

On regrettera enfin qu’en découplant le problème de la transaction et celui de la régularisation, le législateur n’ait pas pris la peine d’envisager spécifiquement les conséquences d’un refus de permis de régularisation qui interviendrait après le payement d’une transaction.