>  Wery Immo   >  Vente et location de biens   >  Le coronavirus et le paiement des loyers

Le coronavirus et le paiement des loyers

Confrontés à la crise du Coronavirus, très nombreux sont les locataires qui se demandent s’ils peuvent suspendre ou arrêter de payer les loyers et tout aussi nombreux sont les propriétaires qui s’inquiètent de bien percevoir leurs loyers.

L’arsenal juridique dispose de règles et même de certaines décisions de jurisprudence qui permettent d’envisager des réponses juridiques à ces questions.

Premier principe : un examen concret de la situation

Chaque cas est une situation particulière. Les principes qui suivent ne sont donc que des orientations générales qui doivent être vérifiées et adaptées à chaque situation. Chaque cas d’espèce nécessite un examen spécifique.

Deuxième principe : en droit du bail ce qui compte c’est la (l’im)possibilité d’occuper les lieux loués

Les répercussions que les mesures prises par le Gouvernement dans le cadre du Covid-19 peuvent avoir sur un bail doivent nécessairement être en relation avec la possibilité d’utiliser les lieux loués. En revanche le seul  fait que le locataire (ou le bailleur) soit confronté à des difficultés financières consécutives à cette crise est sans influence sur le bail, même si certaines mesures peuvent être envisagées sur d’autres bases juridiques.

La crise du Covid-19 peut déboucher sur trois principales catégories de situations en matière locative.

Première situation  : interdiction totale d’occupation

Les mesures prises par le Gouvernement interdisent l’occupation des lieux loués telle qu’elle est précisée dans le bail. C’est la situation de la plupart des commerces et notamment des commerces horeca qui ne peuvent pas être ouverts au public ou encore des locations de seconde résidence dans lesquelles les locataires ne peuvent pas se rendre.

Dans tous ces cas, c’est une règle imposée par les pouvoirs publics (un « fait du prince ») qui empêche l’usage des lieux loués tel qu’il était convenu entre le bailleur et le locataire.

On considère très généralement que dans ce cas, l’obligation de payer le loyer cesse pendant la période où cette occupation est totalement interdite par les pouvoirs publics.

Ce principe doit cependant s’appliquer avec nuance et prudence compte tenu des circonstances :

  • la dispense de paiement des loyers est liée à la destination prévue dans le bail ou qui résulte nécessairement des circonstances. Cette dispense ne sera donc pas applicable si le bail porte sur un bien dont le locataire est libre de faire n’importe quel usage ;
  • il faut vérifier dans chaque cas si le contrat ne contient pas une clause qui fait supporter par le locataire les conséquences d’une situation semblable à celle que nous connaissons aujourdhui.
  • il faut vérifier concrètement dans chaque cas si les mesures gouvernementales ont bien eu pour effet d’empêcher l’occupation des lieux par le locataire. Ainsi, un locataire qui se trouverait par l’effet des circonstances confiné dans sa seconde résidence est évidemment tenu à payer les loyers.
  • enfin, cette solution pourrait être modifiée en fonction des subsides et interventions des pouvoirs publics.

Deuxième situation : restrictions à la pleine et libre occupation

L’occupation des lieux n’est pas interdite mais l’activité doit y être fortement réduite.

Tel est le cas de l’ensemble des activités dans lesquelles le télétravail est imposé ou fortement suggéré. Tel fut le cas pendant quelques jours pour les coiffeurs qui ne pouvaient recevoir qu’un client à la fois.

Dans la mesure où ces règles ont pour effet d’empêcher le plein usage de la chose louée, elles peuvent déboucher sur une réduction partielle de l’obligation de payer les loyers.

Ici plus encore que dans les autres hypothèses, seul un examen cas par cas de la situation concrète de chaque locataire peut déterminer la solution adéquate.

A priori, les principes applicables en cas d’interdiction totale peuvent être transposés mais ils doivent l’être avec modération et proportion. C’est évidemment là que réside la plus grande difficulté et qu’une appréciation particulièrement fine de chaque situation est requise.

Troisième situation : pleine et libre occupation des lieux mais perte de revenus

La crise entraine une réduction sensible des revenus du locataire sans que l’occupation des lieux soit affectée de quelque manière que ce soit.

C’est l’exemple du locataire privé de ses revenus professionnels qui est confiné à son domicile : juridiquement, il est tenu au payement du loyer et il serait d’ailleurs paradoxal que sur la base du droit du bail, il puisse réduire le montant de son loyer alors qu’il occupe les lieux loués de manière plus intensive qu’habituellement.

Dans ce cas, en dehors de l’hypothèse d’une intervention des pouvoirs publics et/ou d’une négociation avec son bailleur, ce sont d’autres règles qui s’appliquent comme dans tous les cas où quelqu’un est confronté à des difficultés financières. Le locataire peut demander des termes et délais et dans le pire des cas, recourir à des solutions telles que la réorganisation judiciaire.

Quatre observations importantes encore:

  • Dans la mesure où les interdictions ou restrictions imposées par les pouvoirs publics constituent un cas de force majeure, le locataire n’a pas besoin de demander l’autorisation préalable du juge de paix pour réduire son loyer ou cesser de le payer, mais évidemment son comportement sera apprécié par le juge si le bailleur conteste la pertinence ou la proportion de la retenue opérée.
  • Les accords que les parties prennent à quelque stade que ce soit sont en principe valables. Le locataire qui accepte expressément de payer tout ou partie de son loyer en période du Coronavirus, alors qu’il pourrait s’en dispenser, est tenu par l’accord qu’il a donné.
  • Les audiences sont suspendues et les juges de paix ne traitent pas actuellement des dossiers qui porteraient sur des arriérés de loyers directement liés à la crise du Coronavirus.
  • Ces considérations ne valent que si les difficultés sont directement liées à la crise actuelle. Un locataire qui état déjà en retard de paiement avant la mi-mars ne pourra tenter de se justifier en invoquant les mesures prises après ces retards de paiement.

De nombreuses autres législations peuvent intervenir dans la solution des problèmes.

Le Coronavirus rentre assurément dans la catégorie des cas de force majeure. Le traitement de ses conséquences dans le cadre d’un bail nécessite un examen attentif et personnalisé.